COMMUNISME, NOS 99-101/2011

D’abord, il est utile de dire quelques mots sur la revue, étant donné qu’elle est peu connue en Roumanie et, selon nos informations, elle a été une seule fois présentée, à l’occasion du numéro spécial consacre à la Roumanie (91-92/2007).
La revue trimestrielle Communisme a été créée en 1982. Jusqu’en 1986, elle a été éditée par les Presses Universitaires de France, puis publiée à L’Âge d’Homme, à l’appui de l’éditeur Vladimir Dimitrievitch. Dès le début et jusqu’en 1995, la revue a été dirigée par Annie Kriegel, puis par Stéphane Courtois, nom bien connu au publique roumain à la suite du Livre noir du communisme.
La revue a été créé à l’initiative de Courtois (ancien militant maoïste), qui a groupé autour de lui d’autres militants communistes désengagés après 1971 (l’année de la publication par Soljenitsyne de l’Archipel du Goulag), et à l’appui d’Annie Kriegel, elle-même un ancien membre de l’appareil du Parti communiste français, pendant la période 1945-1956. Ainsi se sont réunies deux générations de chercheurs qui ont valorisé leur expérience dans l’étude académique du phénomène communiste. Le résultat a été une revue de grande tenue intellectuelle, l’une des plus importantes au niveau mondial.
Le numéro s’ouvre avec un mot à la mémoire de l’éditeur Vladimir Dimitrievitch qui, au cours de l’année, s’est tué dans un accident de voiture.
Le numéro centenaire de la revue est dédié à la mémoire d’Annie Kriegel, historien et fondatrice de la revue, décédée en 1995, s’intitule Annie Kriegel et le système communiste mondial et réunit, en principal, les communications présentées au Colloque international qui a eu lieu en janvier 2010 sous le titre Le système communiste mondial – du concept kriegelien à la réalité.
Le concept de « système communiste mondial », forgé par Kriegel dans les années 1982-1984, suppose l’existence de trois sous-systèmes : le sous-système des partis, le sous-système des partis-États et le sous-système des alliances, et l’accès aux archives soviétiques, à partir de 1992, a confirmé pleinement cette analyse.
Après une présentation du concept kriegelien, de la part de Stéphane Courtois – Annie Kriegel et le concept de système communiste mondial, les communications se sont axées sur des sujets qu’illustraient un de ces trois sous-systèmes (celui des alliances) : Yves Santamaria – Le « national-thorézisme » et la « lutte pour la paix »  et Sylvain Boulouque – Le lieu du syndicalisme dans le système communiste mondial, ou des thèmes spécifiques liés au sujet : Nikos Marantzidis – Le système communiste mondial et la guerre civile grecque et Antonio Elorza – L’expansion et l’apogée du système communiste mondial, 1945-1979. Et nous n’avons indiqué qu’une partie de celles-ci.
Étant donné qu’il s’agit du numéro centenaire de la revue, celui-ci contient aussi 130 pages de listes d’auteurs et d’articles publiés pendant les trois décennies de parution régulière, qui représentent 14 000 pages publiées, chiffres impressionnantes en soi.
L’Introduction signée par Courtois rend compte des réussites, mais aussi des difficultés de cette activité éditoriale, dès le début, indissolublement lié aux difficultés mentales que les anciens militants rencontraient dans leurs désengagement face à l’adhésion à une idéologie totale et extrême, pour continuer avec l’annulation de la subvention du CNRS, par des raisons idéologiques, après la publication du Livre noir du communisme en 1997, et pour finir avec la récente disparition de l’éditeur, fait qui a plongé la revue dans une situation encore plus difficile. Il y a des remarques amères de ce type : « Toutefois, les ʻ jeunes ’ d’alors (la génération de Courtois – n. n.) semblent arriver de nouveau dans la situation d’il y a trente ans... » (p. 5).
Enfin, vu les difficultés matérielles, il semble que la revue va se métamorphoser dans un annuaire. Toutefois, c’est sûr que la bataille pour une histoire objective et pour une mémoire juste des victimes va continuer et, pour y réussir, elle a besoin d’une tribune. Nous sommes convaincus que la revue Communisme – ou son héritier – continuera rester un repère dans ce processus.

Bucarest, le 5 février 2015.

Publié dans « Archives Review », no 2/2011, pp. 203-204.